lundi 8 juin 2020

De la nature des tailles ou comment réussir techniquement sa gravure

Pour un graveur,  ce qui est important c’est le résultat en matière  de noirceur des tailles imprimées. 
Avec l’acide nitrique ou avec le perchlorure de fer, le résultat obtenu ne dépend pas de la nature des tailles : tailles croisées  plus ou moins serrées , ligne isolée ou multiples, pointillés. À temps  de morsure égal le résultat obtenu est le même.

Avec l’électrolyse, le résultat dépend complètement de la nature des tailles.
Prenons un exemple :
Imaginons que nous mordons tout pendant 20 minutes.
Un point, une ligne, seront très profondément mordus et très foncés et très noirs.
Les lignes parallèles seront d’autant moins mordues qu’elles seront serrées . Les plus serrées seront donc plus claires.
Les tailles croisées  seront également d’autant plus claires qu’elles seront serrées.

« Serré » fait référence à des tailles espacées de moins de 0,3 à 0,5 mm Soyons précis : cela peut se mesurer avec un coupe-fil et un morceau de papier gradué. Le microscope, que j’emploie aussi, c’est pour  les fadas !

Pour dire les choses autrement :
Pour obtenir un résultat très foncé, 20 minutes sont nécessaires pour un point ou une ligne, 120 minutes sont nécessaires pour des tailles croisées très serrées.

Ainsi, le protocole de gravure doit impérativement tenir compte de la nature des tailles.
Si le temps total de morsure est de 120 minutes
on commence par les tailles très serrées croisées très foncées qui seront mordues 120 minutes. Après 60 minutes (par exemple) de morsure,on grave  les tailles croisés très serrées plus claires, ou bien les lignes parallèles plus sensibles à la morsure qui, elles seront plus sombres que les tailles croisées.

Mordons 40 minutes de plus.
Durant les 20 minutes qui restent nous avons le choix entre:
Des tailles croisées très serrées qui donneront un résultat pâle.
Des lignes proches les unes des autres, avec un résultat intermédiaire,
Une ligne isolée (signature par exemple) ou des points qui donneront un résultat très foncé.

On réalise donc l’ensemble de la gravure avec un seul vernis, en gravant puis en mordant selon le résultat souhaité.
Ceci nécessite une certaine d’habitude, un protocole établi dès le départ.  Il arrive naturellement que je modifie le protocole en cours de route lorsque je veux rajouter un détail, ou si je trouve une façon de faire plus simple ou plus efficace.

La gravure à l’eau-forte nécessite de la patience surtout avec l’électrolyse.
Avant de mordre une zone gravée, il faut s’assurer qu’on a rien oublié . Quand c’est mordu c’est trop tard. Les corrections nécessiteront un nouveau vernis. C’est possible, comme avec l’ancienne méthode. On appelle cela un nouvel état. Pourquoi pas ?

Ma dernière gravure selon ce protocole:

 


Avec un peu d'habitude c'est presque facile et en tout cas non toxique et sans danger.